Selon Mounir Mahjoubi, les auteurs du documentaire “Hold Up” seraient “complices de mise en danger de la vie d’autrui”

Création : 19 novembre 2020
Dernière modification : 21 juin 2022

Autrice : Claire Manoha, étudiante en Master Culture judiciaire à l’Université Jean Moulin Lyon 3, sous la direction d’Audrey Darsonville, professeur de droit à l’Université de Nanterre

Source : BFM TV, 14 novembre 2020, repris sur son compte Twitter

Pour considérer qu’il y a “mise en danger de la vie d’autrui” le Code pénal exige une “exposition directe à un danger”. Or le documentaire “Hold up” n’expose personne directement au virus. De plus, Mounir Mahjoubi dénonce une “complicité”. Mais alors qui est l’auteur principal de l’infraction de mise en danger d’autrui dans la cas du covid-19 ?

Le député Mounir Mahjoubi fait référence au documentaire “Hold up, retour sur un chaos”. Réalisé par Pierre Barnérias, ce documentaire tente de prouver l’existence d’une “manipulation mondiale” visant à propager l’épidémie de coronavirus. Objet d’une forte diffusion sur les réseaux sociaux, ce film contient de nombreuses informations fausses ou inexactes. Mounir Mahjoubi affirme que toutes les personnes ayant participé à la fabrication de ce documentaire mais aussi les plateformes qui le diffusent pourraient être poursuivies pour complicité de mise en danger d’autrui. Il va vite en besogne …. 

Selon le code pénal,  “Le fait d’exposer directement autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures par la violation manifestement délibérée d’une obligation particulière de prudence ou de sécurité est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende.”. Le complice est celui qui aide à commettre cette infraction. Appliquons cette disposition au cas du documentaire “Hold up”. 

Première question, y-a-t-il eu “exposition directe à un danger” comme l’exige le code pénal ? Selon la Cour de cassation, l’exposition à un risque ne peut pas être seulement indirecte. Il doit exister une certaine proximité dans le temps et dans l’espace entre l’action d’une personne et le risque qu’elle crée sur autrui. Par exemple, la mise en danger de la vie d’autrui est caractérisée lorsqu’une personne roule de nuit, en ville, à 180 km/h en faisant du slalom entre les véhicules. On comprend ici combien ce comportement pose un risque immédiat et direct de mort ou de blessures pour les autres

La diffusion de ce documentaire est-elle réellement de nature à engendrer un risque immédiat et direct de mort ou de blessures ? A l’évidence non. Le lien de causalité entre la diffusion du documentaire et le risque de causer la mort où l’infirmité permanente d’une personne est bien trop hypothétique. En d’autres termes, aucun spectateur ne risque directement et immédiatement de mourir du coronavirus après le visionnage du film. La référence à l’infraction de mise en danger d’autrui est donc très excessive. 

Enfin, il manque un élément primordial : si les réalisateurs du documentaire sont les “complices” selon Mounir Mahjoubi qui seraient les auteurs principaux de l’infraction de mise en danger ?

Sur le plan politique, on peut entendre sa volonté de blâmer ceux qui répandent de fausses informations sur l’épidémie. Mais sur le plan de la responsabilité pénale, et quoiqu’on pense d’eux, les auteurs du “documentaire” ne peuvent être poursuivis pour complicité de mise en danger d’autrui.

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