Guillaume Paumier, CC 3.0

Philippe de Villiers suggère à Emmanuel Macron d’organiser un référendum qui placerait la Constitution Française au-dessus des juges, du Traité de Schengen, de la Cour de Justice européenne et de toutes les décisions européennes

Création : 22 décembre 2023
Dernière modification : 23 décembre 2023

Auteur : Guillaume Baticle, doctorant en droit public

Liens d’intérêts : aucun

Fonctions politiques ou similaires : aucune

Relecteur : Jean-Paul Markus, professeur de droit public, Université Paris-Saclay

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Secrétariat de rédaction : Sasha Morsli Gauthier

Source : Compte X (Twitter) de Philippe de Villiers, 17 décembre 2023

Placer la Constitution au dessus des règles européennes reviendrait à enfreindre la hiérarchie entre les normes et exposerait la France à des sanctions. La solution serait de quitter l’Union européenne.

Sur le plateau de CNEWS, relayé sur son compte X, l’ancien député européen Philippe de Villiers appelle le Président de la République à organiser un référendum très ambitieux qui placerait la Constitution française au-dessus de toutes les règles et institutions européennes. Ce n’est pas impossible, mais alors il faudra en assumer les conséquences.

Il faudra sortir de l’UE

L’article 55 de la Constitution française est clair sur la supériorité des traités par rapport aux lois nationales : les traités ont “une autorité supérieure à celle des lois”. Mais il ne dit pas si les traités sont supérieurs à la Constitution française. En revanche, l‘alinéa 14 du préambule de la Constitution de 1946, qui est toujours en vigueur aujourd’hui, prévoit que “La République française, fidèle à ses traditions, se conforme aux règles du droit public international”. Ce préambule, qui a la même valeur que la Constitution (depuis la décision du Conseil constitutionnel du 16 juillet 1971 et précisé par la décision du 9 avril 1992), pose le principe de subordination de la Constitution aux traités européens et internationaux que la France a ratifiés. Seule solution pour se délier de ces règles sans risquer de souffrir de lourdes sanctions financières par les tribunaux français et la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) : modifier ces textes et ensuite se retirer des traités et organisations, à l’image du Royaume-Uni qui a quitté l’Union européenne.

L’adhésion à l’UE est incompatible avec la supériorité de la Constitution sur les traités

L’adhésion à l’Union s’accompagne de l’obligation d’appliquer ses règles dites “supranationales”, car elles ont précisément vocation à prévaloir sur le droit national. C’est le principe même des traités qui ont créé l’Union européenne, lesquels ne sont jamais qu’un contrat entre États. Or, un contrat se respecte.
Les traités régissant l’Union européenne mettent en place ce qu’on appelle un ordre juridique autonome : des “lois” européennes (des directives, des règlements), et les traités eux-mêmes, tous ces textes primant sur la loi nationale, comme le martèle la CJUE depuis sa décision Costa contre ENEL de 1964, et comme l’ont reconnu les États membres en 2007 en signant unanimement une déclaration en ce sens.
Rester au sein de l’Union européenne sans faire primer les textes européens qui en découlent est incompatible en l’état du droit européen.

Pénalités financières en perspective si la France reste dans l’UE

De plus, cela ferait encourir de fortes amendes ou des astreintes journalières à la France, pour manquement à ses obligations européennes (l’Espagne fut ainsi condamnée par la CJUE le 25 février 2021 car elle n’avait pas appliqué certains textes européens).

Certains États, il est vrai, font durer le suspense sur le point de savoir s’ils vont payer l’amende. Ainsi, la Pologne est condamnée à une amende d’un million d’euros par jour depuis 2021, puis de 500 000 euros depuis quelques mois jusqu’à ce qu’elle se mette en conformité avec la législation européenne. Mais une telle attitude ouvrirait une grave crise de l’État de droit, une composante de “l’identité même de l’Union”, comme l’a affirmé à l’unanimité la Cour de justice dans une décision du 16 février 2022.

Contacté, Philippe de Villiers n’a pas répondu aux Surligneurs.

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