Lumière sur des acteurs du processus électoral : quel rôle jouent les assesseurs des bureaux de vote et les observateurs des partis politiques dans la régularité et la sincérité du scrutin ?

Création : 21 avril 2022
Dernière modification : 21 juin 2022

Autrice : Camélia Foual, master de droit public, études parlementaires et législatives, Université Aix-Marseille 

Relectrice : Sophie Lamouroux, maître de conférences en droit public, Université Aix-Marseille

Relecteur : Jean-Paul Markus, professeur de droit public, Université Paris-Saclay

Secrétariat de rédaction : Emma Cacciamani et Loïc Héreng

Très méconnu, l’assesseur du bureau de vote est un rouage essentiel de la démocratie. C’est sur lui, et les délégués des partis, que repose la régularité et surtout la sincérité du scrutin.

Après le premier tour de l’élection présidentielle dimanche 10 avril 2022, l’attention s’est portée sur un élément essentiel de notre processus électoral : le scrutin, organisé par les bureaux de vote dans toutes les communes de France. Le fonctionnement de ces bureaux, que d’aucuns avaient mis en cause par anticipation, est défini par le Code électoral.

Un bureau de vote est composé d’un président, d’au moins deux assesseurs et d’un secrétaire. Deux membres au moins doivent rester présents tout au long du scrutin: le président du bureau de vote (ou à défaut, le plus âgé des assesseurs) et un assesseur.

Les assesseurs organisent le scrutin

Un assesseur est un électeur ou une électrice chargés d’accompagner le président d’un bureau de vote afin de s’assurer que le scrutin se déroule dans de bonnes conditions ainsi que dans le respect de la loi. Il siège derrière la table de vote, vérifie l’identité des électeurs (ou le droit de voter), leur inscription sur la liste électorale, surveille les signatures sur la liste d’émargement, vérifie la validité des procurations, estampille la carte électorale et participe à l’organisation du dépouillement. 

Il faut au moins deux assesseurs par bureau de vote. Ils sont désignés par les candidats et le maire. Chaque candidat, ou liste en présence, a le droit de désigner un assesseur et un seul, parmi les électeurs du département. Un suppléant peut également être désigné parmi les électeurs. Pour les élections présidentielles, les assesseurs peuvent être choisis par le représentant local du candidat. Dans le cas où il n’y aurait pas d’assesseurs volontaires, le Code électoral permet au maire de désigner des assesseurs supplémentaires parmi les conseillers municipaux (dans un certain ordre) puis parmi les électeurs de la commune.

Les délégués surveillent les assesseurs et le scrutin

Les partis politiques sont présents à toutes les étapes du processus électoral. Une invitation est à cet égard adressée aux partis politiques et aux candidats, afin qu’ils désignent leurs délégués  en tant qu’observateurs et témoins du processus électoral. Ces délégués ne font pas partie du bureau et ne peuvent donc pas prendre part à ses délibérations mais ils veillent à ce que les opérations de vote s’effectuent dans le respect du Code électoral ; ils contrôlent les opérations de dépouillement et de décompte des voix ; ils peuvent contester la validité de certains bulletins ou enveloppes ; ils peuvent enfin inscrire, avant ou après la proclamation du scrutin sur le procès-verbal du bureau de vote toutes observations, protestations ou contestations sur lesdites observations. Assesseurs et délégués mènent le même combat : assurer la régularité et la sincérité du scrutin. 

Distinguer la régularité du scrutin et sa sincérité

La validité des résultats d’un scrutin est conditionnée à sa régularité et à sa sincérité. La régularité du scrutin englobe tous les aspects procéduraux, qui doivent se dérouler conformément au Code électoral : la présence de tous les documents administratifs, des bulletins de vote, des isoloirs, le respect des conditions de vote, etc.

La sincérité du scrutin s’analyse par rapport à la volonté réelle de l’électeur. Le résultat du scrutin doit autant que possible refléter l’état de l’opinion française. Cela implique l’égalité des conditions de la compétition entre les candidats et l’égalité de décompte des voix : un électeur, une voix. Cela implique aussi l’égalité de représentation à travers le découpage électoral. Ce découpage, que d’aucuns qualifièrent naguère de “charcutage électoral”, peut être biaisé, au sens ou des circonscriptions peuvent être taillées sur mesures pour avantager tel ou tel candidat (noyer une zone résidentielle jugée à droite dans une zone d’habitats collectifs censée voter à gauche, ou au contraire découper une zone dense d’habitats collectifs pour la diluer dans des zones résidentielles et diminuer ainsi son impact sur le scrutin). Ces charcutages sont devenus plus difficiles, mais des doutes subsistent parfois. Mais la pratique est vivace dans d’autres pays, comme aux États-Unis.

La sincérité est aussi garantie par la protection de la liberté de choix : aucun électeur ne doit être influencé par une personne, un organisme extérieur, encore moins subir de pressions de l’État. Enfin, on retrouve le principe du secret du vote, qui permet à chaque électeur de garder son vote secret, ce qui est garanti par la mise en place d’isoloirs. L’électeur doit effectuer son vote en toute conscience et en suivant sa seule volonté, sans pressions extérieures, y compris au sein des bureaux de vote. 

L’atteinte au secret du vote est lourdement sanctionnée. Comme dans la plupart des démocraties respectant l’État de droit, toutes ces garanties figurent dans la Constitution, qui prévoit un suffrage “universel, égal et secret”. On retrouve ces exigences au niveau européen avec le protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

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