Jean-Luc Mélenchon compare les événements de Brasilia à la perquisition de 2018 au siège de LFI
Auteur : Jean-Paul Markus, professeur de droit public, Université Paris-Saclay
Relectrice : Audrey Darsonville, professeure de droit pénal et sciences criminelles, Université Paris Nanterre
Secrétariat de rédaction : Emma Cacciamani, Yeni Daimallah et Loïc Héreng
Source : Compte twitter Jean-Luc Mélenchon, 9 janvier 2023
Ou comment comparer l’incomparable en droit : une tentative d’insurrection contre un pouvoir légitime élu, et une perquisition dans le siège d’un parti politique et au domicile de ses dirigeants.
Le tweet de Jean-Luc Mélenchon répond à Stéphane Séjourné. Celui-ci, devant la chaîne Public Sénat, interrogé sur les événements insurrectionnels de Brasilia, dénonçait les risques de reculs démocratiques, « mettant en garde » certains partis politiques qui remettent en cause la légitimité des autorités politiques issues des élections. Il nommait à cet égard LFI, et sa « tentation » de semer le doute sur la légitimité des élus.
Le texte du tweet est le suivant : « Honteuse comparaison. Mais quand les policiers factieux s’en sont pris à notre siège en 2018 la macronie n’avait rien à dire ». Il fait référence aux incidents qui avaient eu lieu durant la perquisition (qualifiée par lui « d’agression politique« ) dont LFI et ses principaux cadres avaient fait l’objet en 2018, dans une ambiance pour le moins houleuse. Ces incidents avaient donné lieu à une condamnation de Jean-Luc Mélenchon en 2019 pour “rébellion” et “provocation”. Ce tweet de Jean-Luc Mélenchon n’a aucun fondement en droit.
Premièrement, ce qui s’est produit au Brésil constitue une insurrection (ou une tentative d’insurrection). C’est-à-dire, selon un dictionnaire juridique (le « Cornu », chez PUF), un mouvement tendant à renverser par la violence le pouvoir établi, donc en dehors de tout cadre légal. L’insurrection n’a rien à voir avec la simple perquisition dans le siège d’un parti politique et au domicile de ses dirigeants. Une perquisition, selon le même dictionnaire, est une « mesure d’investigation destinée à rechercher, en vue de les saisir, tous papiers, effets ou objets paraissant utiles à la manifestation de la vérité« . Elle résulte de l’application du Code de procédure pénale, sous le contrôle de magistrats du Parquet. Contrairement à une insurrection, qui par définition écarte la loi, la perquisition est strictement encadrée par la loi.
N’est pas victime de factieux qui veut
Deuxièmement, Jean-Luc Mélenchon évoque des « policiers factieux« qui auraient procédé à la perquisition au siège de LFI et à son domicile : la huitième édition du dictionnaire de l’Académie nous apprend que le « factieux » est celui « cherche à provoquer des troubles pour ébranler le pouvoir« . LFI est un parti politique. LFI n’incarne pas le pouvoir, et même si Jean-Luc Mélenchon avait été élu président en 2022, son parti n’aurait pas pour autant pu être qualifié de « pouvoir« .
En somme, Jean-Luc Mélenchon répond à ce qu’il qualifie de « honteuse comparaison« sur le plan moral et politique, par une comparaison absurde sur le plan juridique.
Contacté, Jean-Luc Mélenchon n’a pas répondu à notre demande de précisions.
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