Capture d'écran d'un compte Facebook

Des nageuses prennent position contre la présence de personnes transgenres en compétition ?

Création : 29 avril 2024

Auteur : Etienne Merle, journaliste

Relectrice : Lili Pillot, journaliste

Liens d’intérêts ou fonctions politiques déclarés des intervenants à l’article : aucun

Secrétariat de rédaction: Sasha Morsli Gauthier

Source : Compte Facebook, 24 avril 2024

Vue plusieurs millions de fois en seulement 48h, une photo d’athlètes cartonne sur les réseaux sociaux : des nageuses auraient pris position contre la participation de sportives transgenres dans une compétition féminine. Les Surligneurs sont allés vérifier.

C’est ce qu’on appelle un gros buzz. Avec plus de trois millions de vues en seulement 48h, une photo d’athlètes publiée le 24 avril fait fureur sur Facebook. L’image présente quatre nageuses tout sourire, bras dessus bras dessous, devant une grande piscine sportive.

Rien d’anormal jusque-là, mais en y regardant de plus près, on aperçoit une inscription sur le bas de leur maillot de bain : “Not a dude” (“Pas un mec“, en français).

La photo est accompagnée d’un court texte, et à l’en croire, ces nageuses auraient un message hautement politique à faire passer : “Des athlètes féminines marquent “je ne suis pas un homme” sur leur maillot pour manifester contre les performances scandaleuses des athlètes transgenres dans la compétition. Qu’en pensez-vous ?

Capture d’écran Facebook.

 

Polémiques régulières

Ce post relance un débat houleux autour de l’intégration des personnes transgenres au sein des compétitions sportives. Chaque année, les décisions des fédérations sportives d’autoriser ou non leurs compétitions à des athlètes transgenres provoquent des polémiques.

Et il en va de même lorsqu’une personne transgenre parvient à gagner ou à obtenir un bon classement au sein d’un concours. Dans le post Facebook qui nous concerne, le terme “scandaleuses” inscrit sur la photo ne laisse que peu de place au doute quant aux convictions de cet internaute. Et elles en deviennent évidentes lorsque l’on s’aperçoit que la photo est un montage grossier.

À la recherche de la photo originelle

Si un coup d’œil attentif aurait permis de se rendre compte de la supercherie, quelques outils la rendent incontestable. Avec l’aide d’une recherche sur l’outil Tineye, qui permet de retrouver des photos similaires partout sur le net, on tombe sur plusieurs résultats renvoyant vers des sites… pornographiques.

Au-delà de l’aspect curieux de la situation, les sites X permettent d’obtenir deux informations essentielles. D’abord, sur ces images, aucun maillot de bain des nageuses ne porte d’inscription.

Or, la publication la plus récente de cette photo sur ces sites remonte au mois de février 2024, deux mois avant sa mise en ligne sur Facebook. La photo a donc bien été retouchée avant d’être partagé sur le réseau social.

Ensuite, on apprend que l’une des nageuses s’appellerait Ariarne Titmus. Avec une simple recherche sur Google, on tombe sur une athlète australienne, double championne olympique en 2020 et médaillée à de nombreuses reprises en natation.

Un simple comparatif entre les photos disponibles en nombre sur les moteurs de recherche avec celle qui nous intéresse ici, permet de confirmer qu’il s’agit bien de la championne.

Reste désormais à s’assurer que la photographie publiée sur les sites pour adultes n’a pas été détournée. En fouillant rapidement le compte Instagram de la nageuse, on la retrouve facilement. Elle a été mise en ligne le 12 mars 2023 et sans surprise, aucun texte ni inscription ne figure sur la publication.

Une “fake news” déjà observée aux États-Unis

Ce n’est pas la première fois que des photos d’athlètes sont trafiquées pour tenter de peser sur le débat public autour de la question de l’intégration des personnes transgenres dans les compétitions sportives.

Nos confrères de l’AFP, en mars 2024, ont déjà démontré qu’une photo de jeunes joueuses américaines de waterpolo avait été modifiée pour y ajouter l’inscription “Not a dude” sur leur maillot. La publication dénonçait déjà l’intégration des personnes transgenres dans les compétitions sportives.

À l’époque, nos confrères n’avaient pas pu remonter jusqu’à l’origine de cette désinformation. Malgré nos efforts, nous en sommes restés au même point.

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