Bernard Guetta, à propos des frappes françaises en Syrie le 14 avril : «[L’attaque] était juridiquement justifiée […] puisque les conventions internationales prohibent l’emploi de ces armes »

Création : 5 novembre 2018
Dernière modification : 17 juin 2022

Auteur : Raphaël Maurel

Source : France inter, 16 avril 2018

En intervenant au nom du Conseil de sécurité mais sans son autorisation, la France, le Royaume-Uni et les États-Unis violent en réalité le droit international dont ils prônent le respect.

Bernard Guetta, chroniqueur géopolitique sur France inter, intervenait sur le sujet de la justification des frappes françaises, anglaises et américaines sur des installations syriennes. Mais son affirmation révèle une méconnaissance du système de maintien de la paix et de la sécurité internationales.

Si les frappes peuvent être justifiées sur le plan moral, politique et même légal au regard de la Constitution française, elles constituent en droit international une agression armée sur le territoire d’un État souverain.

Si la France, ou d’autres États, souhaitent se plaindre du non-respect par la Syrie de ses engagements internationaux relatifs à l’emploi des armes chimiques, des mécanismes excluant systématiquement le recours à la force le permettent. Ils sont prévus par l’article 33 de la Charte des Nations unies. Si chaque État constatant qu’un de ses partenaires méconnaît une convention internationale devait intervenir militairement contre lui, le monde serait en guerre permanente.

C’est justement la raison pour laquelle la communauté internationale s’est accordée, après 1945, pour confier la responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité internationales au Conseil de sécurité des Nations Unies. Cet organe collectif est seul habilité à autoriser le recours à la force armée contre un État, moyennant trois exceptions : légitime défense prévue par l’article 51 de la Charte, consentement de l’État, ou, en cas de blocage du Conseil, autorisation par l’Assemblée générale des Nations Unies. Les États ne sont pas autorisés à décider unilatéralement de la bonne application, par l’un des leurs, des résolutions du Conseil ou du droit international : la règle est le multilatéralisme.

La création en janvier 2018 d’un Partenariat international contre l’impunité d’utilisation d’armes chimiques ne modifie pas l’état du droit : ce n’est qu’en vertu d’une autorisation explicite du Conseil de sécurité que des États peuvent mener une attaque en son nom. En agissant sans mandat, la France et ses alliés se rendent au contraire responsables d’une agression armée, de la même manière que les États-Unis lorsqu’ils sont intervenus en Irak en 2003.

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