Donald Trump, annonce que « les États-Unis vont se retirer de l’accord nucléaire iranien »

Création : 5 novembre 2018
Dernière modification : 17 juin 2022

Auteur : Raphaël Maurel

Source : Intervention télévisée, mardi 8 mai 2018

Le retrait de l’accord iranien annoncé par le Président Trump constitue une violation de plusieurs règles de droit international.

L’annonce du Président américain masque en réalité une violation du droit international : l’accord du 14 juillet 2015 sur le nucléaire iranien n’est pas une convention internationale dont on peut se retirer aisément.

L’accord est un « Plan d’action global commun » approuvé en juillet 2015 par une résolution du Conseil de sécurité des Nations Unies. Obligatoire entre les parties signataires dès sa ratification, certaines dispositions – notamment l’obligation de lever les sanctions contre l’Iran – sont ainsi devenues obligatoires pour tous les États du monde, quand bien même ils n’ont pas signé l’accord.

En droit international, le retrait d’un accord international est régi par la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969, et en premier lieu par son article 42 selon lequel « [l]’extinction d’un traité, sa dénonciation ou le retrait d’une partie ne peuvent avoir lieu qu’en application des dispositions du traité ou de la présente Convention ». Or, contrairement à d’autres conventions – comme le Traité sur l’Union européenne qui prévoit en son article 50 une procédure de retrait de l’Union, actuellement utilisée par le Royaume-Uni – il n’existe aucune disposition prévoyant la dénonciation ou le retrait dans le Plan d’action global de 2015.

C’est donc l’article 56 de la Convention de Vienne qui s’applique. Celui-ci prévoit que la dénonciation ou le retrait n’est envisageable que si cette possibilité entrait dans l’intention des parties au moment de la signature, ou si elle peut être déduite de la nature du traité. Ce n’est pas le cas ici. La partie qui souhaite se retirer du traité doit également notifier « au moins douze mois à l’avance son intention », sachant que la Cour internationale de Justice a eu l’occasion, dans un avis consultatif de 1980, de rappeler que ces dispositions supposent « une obligation d’agir de bonne foi et de tenir raisonnablement compte des intérêts de l’autre partie au traité ». Le calendrier de retour des sanctions semble là aussi en complète contradiction avec le droit international : le néoconservateur John Bolton, conseiller à la sécurité nationale, a annoncé à la télévision que le processus de remise en vigueur des sanctions avait débuté dès la signature de la décision, tandis que le Département américain du Trésor a annoncé le rétablissement de sanctions après une période de 90 à 180 jours.

Le Président Trump pourrait s’appuyer sur l’article 60 de la Convention de Vienne, qui prévoit qu’une violation substantielle d’un traité multilatéral par l’une des parties autorise une autre partie spécialement atteinte par cette violation à suspendre l’application du traité. Mais la situation semble bien différente car c’est bien un retrait qui est annoncé et non une suspension ; par ailleurs, aucune violation de l’accord de la part de l’Iran n’a été relevée. Dans le cas contraire, il aurait fallu utiliser le mécanisme de règlement des différends prévu par les points 36 et 37 du Plan d’action global.

Il s’agit donc d’une violation du droit des traités et d’une résolution du Conseil de sécurité des Nations unies. L’application extraterritoriale annoncée des sanctions, qui est une prétention connue des États-Unis, constitue également une violation d’autres règles du droit international. L’application effective du droit international dépend néanmoins, comme souvent, des choix diplomatiques opérés par les États, qui peuvent décider de subir des violations en échange d’autres avantages politiques et commerciaux actuels ou ultérieurs.

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