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Jordan Bardella (RN) : « Il faut instaurer un principe de précaution, sortir de l’espace Schengen et mettre fin à l’immigration clandestine »

Création : 8 septembre 2019
Dernière modification : 20 juin 2022

Auteur : Olivier Peiffert, maître de conférences, Sorbonne-Nouvelle

Source : 6 septembre 2019, BFM TV

Sauf à modifier notre Constitution et les traités européens, le principe de précaution ne s’applique pas au droit des étrangers ni à la politique migratoire de l’Union européenne.

Si le principe de précaution est souvent invoqué à tort et à travers dans le débat public, son application aux politiques migratoires est pour le moins surprenante. Jordan Bardella, eurodéputé du Rassemblement National (RN), fait référence au principe de précaution notamment consacré à l’article 7 de la Charte de l’environnement de 2004, texte à valeur constitutionnelle. En droit de l’Union européenne, on le retrouve à l’article 191 TFUE, qui définit les objectifs et les principes de la politique environnementale européenne.

Or le principe de précaution n’est pas une règle applicable dans le champ des politiques migratoires. Il est avant tout un principe de protection de l’environnement. La Charte de l’environnement le définit de la manière suivante : « Lorsque la réalisation d’un dommage, bien qu’incertaine en l’état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l’environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d’attributions, à la mise en œuvre de procédures d’évaluation des risques et à l’adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage. ». Il a été conçu pour définir la politique à mener dans l’hypothèse ou une activité humaine (production et commerce d’une substance chimique, par ex.) présente un risque pour l’environnement qui ne peut être évalué avec certitude en raison des limites des connaissances scientifiques actuelles. Dans ce genre de situation, le principe de précaution oblige les autorités publiques à prendre, sans attendre, les mesures nécessaires pour prévenir ces risques incertains. 

Il est vrai que le principe de précaution a été appliqué, par exemple, en matière de sécurité alimentaire, pour tenir compte des risques que présentent certains aliments comme les OGM sur la santé des personnes ou en matière d’urbanisme pour s’opposer à l’installation d’antennes relais de téléphonie mobile. Mais cette extension est logique car il s’agit de protéger la santé des personnes, en plus de l’environnement, face à l’introduction de nouvelles techniques ou de technologies qui peuvent présenter un risque. 

En revanche, on ne comprend pas trop ce que veut dire exactement Jordan Bardella quand il se prévaut du principe de précaution pour appréhender les politiques migratoires : où est donc le risque incertain en l’état des connaissances scientifiques ? Si l’eurodéputé fait ici référence au principe de précaution tel qu’il est actuellement consacré en droit français ou européen, force est de constater qu’il commet une erreur de droit. 

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